Et si des ruches digitales pouvaient sauver les abeilles (et notre agriculture) ?

Maillon essentiel dans la sauvegarde de la biodiversité et la sécurité alimentaire mondiale, les abeilles sont menacées. Des ruches d’un nouveau genre pourraient jouer un rôle clé dans leur préservation.
Selon une étude récente, les services de pollinisation dispensés par les insectes, principalement les abeilles, s’élèveraient à 153 milliards d’euros chaque année, soit le PIB de la Hongrie. Les scientifiques précisent que, sans ces services de pollinisation, l’approvisionnement en fruits, légumes, café ou encore cacao pourrait ne plus satisfaire la demande actuelle. Et la menace est réelle: en raison de l’utilisation massive des engrais, pesticides et autres produits dans l’agriculture intensive, les abeilles se meurent dans des proportions particulièrement inquiétantes. Il manquerait actuellement près de 15 millions de ruches rien qu’en Europe. «Les abeilles disparaissent également en grand nombre à cause du varroa, un acarien originaire d’Asie du Sud-Est», explique Audric de Campeau, fondateur de CitizenBees. Autodidacte dans les domaines de la viticulture et de l’arboriculture, il se lance dans l’apiculture de la même manière. Quelques piqûres plus tard, c’est en 2013 qu’il lance CitizenBees en Suisse. Le concept? Proposer aux entreprises, hôtels et bureaux situés en milieu citadin d’héberger des ruches sur leur toiture et de participer ainsi activement à la sauvegarde des abeilles. Ces ruches sont connectées afin de récolter de précieuses informations sur les activités de leurs occupantes.
Butiner des données
Plus de deux ans de recherche et développement et 100’000 francs d’investissement auront été nécessaires à l’élaboration de ce dispositif technologique. Montées sur des balances, les ruches sont munies de webcams et de bandes optiques. Poids, quantité de miel produite ou encore nombre d’abeilles en activité représentent autant de paramètres collectés et croisés avec des données relatives aux emplacements, mais aussi à la météo. Au final, cela permet de mieux comprendre comment favoriser la sauvegarde des butineuses. «Pour une entreprise, héberger ces ruches permet aussi d’impliquer ses collaborateurs et ses clients dans la démarche», ajoute Audric de Campeau. «Un excellent moyen de sensibilisation qui offre par ailleurs la possibilité de récolter son propre miel. En hébergeant nos ruches, nos partenaires participent à la préservation des abeilles tout en bénéficiant d’une plus-value en termes d’interaction, de pédagogie et de lien avec leurs clients ou partenaires», résume-t-il.
Essaimer localement
Avec près de 200 ruches, dont certaines sont louées tandis que d’autres sont gardées en réserve, CitizenBees entend également soutenir une branche qui souffre en (re)donnant du travail aux apiculteurs. Pour développer son activité, l’entrepreneur mise ainsi sur une dimension à la fois locale et engagée, en faisant appel aux professionnels du secteur situés aux alentours des ruches louées. L’entreprise emploie aujourd’hui six collaborateurs en Suisse et en France – en plus du réseau créé avec les apiculteurs régionaux – et génère un chiffre d’affaires annuel de 200’000 francs. Avec une progression de 30 à 50% attendue ces prochaines années, CitizenBees entend bien poursuivre son activité et faire face à la concurrence qui semble se mettre en place. «Un signe encourageant», poursuit l’entrepreneur. «Cela indique que notre idée de départ était bonne et que le concept séduit un nombre croissant de clients comme de partenaires. On peut y voir une réelle tendance à la fois économique et vertueuse.»
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